
Rimouski bouillonnait d’artistes, de scientifiques, de sportifs, d’amoureux de la mer et de la nature ainsi que de nombreux philosophes barbus. Quant aux femmes, elles étaient partout. Évidemment, il y avait des clubs de gars, c’est bien normal car il y avait aussi des clubs de filles. Tout ce beau monde, que j’ai appris à connaître et à aimer au fil des ans, se rencontrait dans les restaurants, bars et cafés pour discuter de tout et de rien. Surtout de tout. La théorie du Tout était à la mode. Peu à peu je me suis fait des amis et amies dans le Cégep. Je fréquentais le café/restaurant La Cathédrale et le Bar O. Plus tard ce fut le Mix. À ma grande surprise ces lieux étaient des place publiques ou circulaient les potins et informations de la ville. C’était nouveau, pour l’urbaine que j’étais, habituée à l’anonymat. Des professeurs que je côtoyais, Rolande Ross (décédée), Michelle Naud, Michelle Therrien et Jean-Yves Saint-Pierre devenus des amis depuis, vantaient le leadership de leur ex-présidente du syndicat, alors trésorière de la FNEEQ, installée temporairement à Montréal. La réputation de madame Audette Landry la précédait. On disait d’elle qu’elle était vraiment « in » pour une ancienne religieuse des Dames de la Congrégation Notre-Dame. Elle encouragea plusieurs enseignantes à s’engager dans le syndicalisme, sans que l’on parle de quota. La question des quotas ne se posait même pas et les femmes étaient présentes sans complexe et souvent très éloquentes au micro. Je pense, entre autres, à Christiane Jobin et à Audette Landry. J’ai été très fascinée de l’aisance avec laquelle Audette expliquait au tableau, noir ou vert, la formule mathématique provinciale de répartition des tâches. Peu de profs comprenaient ces formules mathématiques qui donnaient beaucoup de fil à retordre dans de nombreux départements. Il faut savoir que les tâches oscillaient avec le nombre d’élèves et qu’il fallait souvent trouver des stratégies syndicales pour sauver ou éliminer des profs ou des départements. Ces négociations permanentes furent souvent source de tension, surtout dans un petit département comme le nôtre qui comprenait plusieurs disciplines : cinéma, musique et arts plastiques en cours complémentaires ainsi qu’un programme spécialisé en arts plastiques (arts visuels). J’ai vu avec le temps les jeux des alliances et des mésalliances, les jeux de coulisse, les jeux d’influence et les manigances ainsi que les jeux à somme nulle et non nulle. Et bien sûr, le jeu des bons sentiments. J’imagine que ces jeux sont observables, de tous temps et en tous lieux.