« Une civilisation est inachevée si elle n’ajoute pas à l’art de bien travailler celui de bien jouer »
Georges Santayana
Suite aux lectures précédentes, je me demandais comment humaniser les technologies et privilégier la collaboration à la compétition ? Comment utiliser les possibilités ludiques des jeux numériques de façon positive en éducation ? Par hasard, à travers mes recherches, la dilettante pédagogue en moi, est tombée sur cette série de livre/jeunesse de Pierre-Yves Villeneuve, et je me suis lancée de tout cœur dans la lecture de la série GAMER. À ma grande surprise, après avoir lu 3 ou 4 premiers tomes, j’ai rencontré, deux jeunes filles de 12 ans, deux jumelles très intelligentes et très bien éduquées ( Romane et Arielle ) devenues fans de l’héroïne Stargrrrl. Là j’ai compris que j’avais du rattrapage à faire pour suivre cette génération. J’ai pris conscience que mes lectures de jeunesse dataient du siècle précédent. Si l’on exclut les histoires religieuses, Sylvie hôtesse de l’air avait fait rêver plus d’une jeune fille de ma génération, sans atteindre toutefois la célébrité de Bob Morane, sortie la même année en Belgique.

En fait, la série GAMER est écrite par un geek*, d’après ce que j’en comprends. J’ai eu l’impression d’entrer dans un nouveau pays culturel et de tomber en plein dans le fossé des générations. L’auteur connaît très bien la culture jeunesse : cinéma, musique, BD, science-fiction, super-héros, fantasy, etc. ainsi que les divers jeux vidéo, leur évolution technologiques ainsi que l’informatique. Villeneuve fait le pont entre la culture de l’ancien monde et celui de la révolution numérique des jeunes gameurs. Il possède un esprit scientifique critique qui rend cette lecture agréable à lire pour des jeunes, tout en étant instructive à plusieurs niveaux. D’autant plus que l’héroïne Lauréanne, dont l’avatar Stargrrrl, possède les talents de son créateur. Jusqu’où ira-t-elle cette héroïne québécoise, alors que les jeux vidéo attirent une jeunesse mondiale (malgré le fait que les médias et le système d’éducation ne veulent pas le voir et en parler) et que les technologies évoluent constamment ?
L’héroïne de la série, Laurianne, est une jeune fille de 15 ans dont la mère est décédée récemment. C’est ce qui amène son père, avec lequel elle est en bonne relation, à déménager à Montréal. Voilà le contexte dans lequel on voit évoluer cette jeune fille, à travers son processus d’adaptation à la ville, à sa nouvelle école, ainsi qu’avec ses nouveaux amis et nouvelles amies qui ont vite remarqué ses talents de hackeuse et de coureuse de vitesse. Son ennemie jurée la méchante Sarah-Jade a également reconnu les talents de Laurianne et la compétition est vive entre ces deux adolescentes. Mais Laurianne est surtout consacrée à son jeu et à l’étude de son jeu. De fil en aiguille, elle se fait également remarquer à la boutique de jeux vidéo, dans La ligue des mercenaires, qu’elle analyse sans cesse tout en réussissant bien à l’école. Alors que le monde du jeu s’amalgame à sa vie réelle, son talent de hackeuse l’amène dans des aventures périlleuses. En plus, elle doit gérer ses histoires d’amitiés troubles qu’elle analyse et cherche à comprendre.
Devenue leader de l’équipe qui ira jouer en Corée du Sud, Stargrrrl dirige la jeune équipe de Montréal qui s’est fait remarquer favorablement. C’est pourquoi elle sera entraînée avec ses coéquipiers et coéquipières dans des péripéties dignes d’un film d’action de Netflix et la compétition deviendra forte, autant dans le jeu que hors du jeu.
On aime bien cette Stargrrrl que l’on suit dans les deux monde : le monde
« réel » et celui fictionnel. Deux monde que l’héroïne gère sérieusement en réfléchissant à tous ses bons et mauvais coups dans chacun des mondes. Dans le monde virtuel, Laurianne s’est créée un style ou une identité qu’elle décrit et qu’on imagine chacun à notre façon. Elle choisit toujours les munitions de Stargrrrl avec parcimonie et se rend au combat avec courage (Laborit dirait motivation), force, connaissance et détermination. Prête pour toutes les missions, elle affronte des armées de zombies, des traîtres et quantité d’êtres indésirables dans des décors bizarres et compliqués. Dans ses combats, Stargrrrl a des amis qu’elle fréquente dans sa vie réelle et d’autres moins connus ou pas du tout avec lesquels elle fait des alliances quand c’est nécessaire, sinon elle tue allégrement pour sa survie. Cette saga qui se dessine sans fin, montre comment les jeux de rôle dans les jeux vidéo, tout en offrant plusieurs vies fictives, permettent à Andréanne de s’initier au jeu cruel de la vie et de la mort. Stargrrrl est une battante ! Cela nous change des Superman.
« Prenez le temps de jouer, c’est le secret de l’éternelle jeunesse. »
Jacques Salomé
* Depuis le début du 21e siècle, les multiples définitions qui furent attribuées au terme geek peuvent se résumer par leur point commun : le geek est celui qui s’évade grâce à son imaginaire, c’est-à-dire qui se divertit grâce à celui-ci, en se passionnant pour des domaines précis (science-fiction, fantastique, informatique…) dans lesquels il aura une connaissance poussée, et en s’insérant au sein de communautés actives de passionnés. (Wikipedia)